Rendez-vous
Instants Fertiles #08
OMax : de l'analyse à l'improvisation
ÉCOUTE COMMENTÉE
Arturo Gervasoni et Carine Llobet
Arturo Gervasoni propose une découverte commentée du logiciel OMax, illustrée par sa mise en application à partir de trois pièces pour piano du compositeur américain Morton Feldman.
Omax est un logiciel musical développé par l’Ircam. Il analyse en temps réel le matériau stylistique proposé par un musicien afin de produire ensuite lui-même, amplifiée par des haut-parleurs, sa propre improvisation générée à partir du même langage. Un dialogue peut alors s’installer entre l’humain et l’intelligence artificielle, invitant chacun à se poser la question suivante : peut-on distinguer le rôle de l’homme de celui de la machine ?
Le philosophe Bernard Stiegler, disparu cet été, formulait ainsi sa propre réponse : « Ce que fait en réalité un logiciel comme OMax, c’est de l’analyse musicale, ce que fait un musicien qui improvise, c’est de la synthèse musicale. Ce que fait un interprète lorsqu’il est en train d’improviser et qu’il produit une série de notes, c’est juger ces notes musicales au moment où il les produit. Ce jugement ne repose pas sur une analyse, il repose sur une pratique, fondée sur l’inattendu, sinon, cela ne fonctionnerait pas, il doit se surprendre lui-même. Mais le logiciel, lui, produit des analyses en temps réel. Et ces analyses, il les répète, il les reproduit, il les recombine, avec des algorithmes eux-mêmes analytiques mais qui produisent une illusion d’improvisation et de synthèse mais ce n’est pas de l’improvisation. La musique a une fonction spirituelle, pour ne pas dire nécessairement sacrée, par rapport à quoi l’improvisation joue un rôle majeur, qui est précisément de produire de l’inattendu. Il y a encore du nouveau qui est possible. »
Carine Llobet : piano - Arturo Gervasoni : électronique